23-07-2015
A l’issue de plusieurs lectures devant l’Assemblée Nationale et le Sénat et trois recours par le gouvernement à l’article 49-3 de la Constitution, la loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite « Loi Macron », a été adoptée le 10 juillet 2015. Cette loi très dense, qui comporte plus de 300 articles, contient de nombreuses dispositions réunies en 3 titres distincts : « Libérer l’activité », « Investir » et « Travailler ».
Définitivement adoptée à la mi-juillet, la loi Macron « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques », prévoit, dans son volet fiscal, des assouplissements en matière de politiques d’actionnariat salarié.
Ce dispositif permet aux sociétés par actions d’attribuer gratuitement des actions aux membres du personnel salarié de la société ou à certaines catégories d’entre eux.
Au plan juridique, les aménagements sont les suivants :
- la limitation de l’écart entre le nombre d’actions attribuées à chaque salarié (qui ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq) ne concerne plus que les plans attribués à l’ensemble du personnel et portant sur plus de 15% du capital pour les PME non cotées ou sur plus de 10% pour les autres sociétés ;
- la période d’acquisition est réduite à un an, et la période de conservation devient facultative. Toutefois, la durée des deux périodes cumulées ne peut être inférieure à deux ans.
Au plan fiscal, le régime des attributions gratuites d’actions distingue deux types de gains :
L’avantage tiré de l’attribution d’actions gratuites (ou "gain d’acquisition"), qui est égal à la valeur des actions au jour de leur attribution définitive, c'est-à-dire au terme de la période d'acquisition (le fait générateur de l'imposition de ce gain est la cession des actions, que celle-ci intervienne à titre onéreux ou à titre gratuit) ;
Et, la plus-value de cession, qui est égale à la différence entre le prix de cession des actions et la valeur de celles-ci au jour de l’acquisition définitive.
Les dispositions de la loi Macron conduisent à imposer, tant la plus-value d’acquisition, que la plus-value de cession, selon les modalités applicables aux plus-values de cession de valeurs mobilières.
En conséquence, ces gains demeureront imposables au barème progressif de l’impôt sur le revenu, mais bénéficieront tous deux - potentiellement - d’un abattement lié à la durée de détention des actions.
Pour mémoire, sous le dispositif général, le taux de l’abattement pratiqué s’élève à :
50 % lorsque les titres sont détenus depuis au moins deux ans et moins de huit ans à la date de la cession ;
65 % pour une détention d’au moins huit ans.La durée de détention étant décomptée à partir de la date d’acquisition des actions, et jusqu’à la date de leur cession, il conviendra d’être particulièrement vigilant quant aux modalités d’attribution des actions gratuites.Il sera en effet préférable que les titres soient conservés pendant au moins deux ans à compter de leur acquisition définitive de manière à bénéficier d’un abattement de 50 %.
A défaut, l’imposition au barème progressif sans bénéfice d’aucun abattement, conduirait à un taux de taxation plus élevé que celui qui résulterait d’une imposition dans la catégorie des salaires (et ce, compte tenu du nouveau traitement des actions gratuites en matière de prélèvements sociaux) !
Concrètement, pour le bénéficiaire d’actions gratuites, le régime d’imposition devient attractif au plus tôt trois ans après la décision d’attribution (i.e. période minimum d’acquisition d’un an + délai de détention de deux ans pour bénéficier de l’abattement de 50%) et conduit à un taux d’imposition maximal de 42%.
Au plan social, les aménagements pour les salariés sont les suivants :
Au titre de la CSG et CRDS, les gains d’acquisition sont désormais assimilés à des revenus du patrimoine et non plus à des revenus d’activité. Le taux de prélèvement applicable s’élève en conséquence à 15,5% (contre 8%auparavant) ;
La contribution salariale spécifique de 10 % applicable aux gains d’acquisition est supprimée.Les aménagements pour les employeurs sont les suivants :
La contribution due par les employeurs voit son taux diminué à 20 % (contre 30% auparavant). Cette contribution s’applique sur la valeur des actions, à leur date d’acquisition. Elle est désormais exigible le mois suivant la date d’acquisition des actions par le bénéficiaire ;
L’employeur est exonéré du versement de cette contribution lorsque la société concernée est une PME qui n’a jamais distribué de dividende depuis sa création, et ce dans la limite, par salarié, du plafond de la sécurité sociale.
(38 040 € en 2015, étant précisé que cette limite s’apprécie en faisant masse des actions gratuites dont l’acquisition est intervenue pendant l’année en cours et les trois années précédentes).
Impatriés : favoriser leur retour
Dispositif avantageux, le régime des impatriés va être assoupli pour favoriser le retour en France des salariés évoluant au sein de grands groupes à l’étranger. Il permet déjà aux salariés expatriés (pendant au moins 5 ans) et revenant en France de bénéficier d’une exonération d’ISF pour leurs biens situés à l’étranger pendant les cinq années suivantes, ainsi que d’une exonération d’impôt sur certains revenus. Ce dispositif est pérennisé et ouvert aux collaborateurs d’une entreprise (salariés ou mandataires sociaux) ayant changé de fonction au sein du groupe où ils travaillent. Jusqu’à présent, le dispositif ne concernait que les collaborateurs ayant changé de poste au sein de la même entreprise.
A travers cette modification nous voyons une pérennisation générale du volet de ce dispositif, applicable à tout contribuable, même non salarié d’un groupe : l’exonération d’ISF pendant cinq ans des biens étrangers en cas d’installation ou de retour en France après plus de cinq ans passés à l’étranger.
Actionnariat salarié (BSPCE et AGA) : un allègement très significatif
La loi Macron veut faciliter l’attribution de Bons de souscription de parts de créateurs d’entreprise (BSPCE).
Pour rappel, les BSPCE confèrent à leurs bénéficiaires le droit de souscrire des titres représentatifs du capital d’une entreprise à un prix définitivement fixé au jour de leur attribution.Ils ne peuvent être émis que par les sociétés par actions immatriculées depuis moins de 15 ans et dont le capital est détenu directement ou indirectement à hauteur d’au moins 25% par des personnes physiques.Il est important de noter que le gain net réalisé lors de la cession des titres issus de l’exercice des BSPCE reste à ce jour soumis à l’impôt sur le revenu à un taux fixe de 19 % (30 % lorsque le bénéficiaire exerce son activité dans la société depuis moins de trois ans), auquel s’ajoutent 15,5 % au titre des prélèvements sociaux, et potentiellement 3% à 4% au titre de la CEHR.Par ailleurs, les BSPCE sont exonérés des contributions patronales et salariales.
Ouvert aux sociétés non cotées ou cotées (dont la capitalisation boursière est inférieure à 150 M€) et ayant moins de quinze années d’existence, les BSPCE pourront être attribués également aux collaborateurs des filiales détenues à hauteur de 75% par leur société mère. Les entreprises issues d’une fusion pourront également continuer de bénéficier de ce dispositif très stratégique dans l’univers des start-ups pour attirer des talents.
Les membres du personnel salarié ou les dirigeants (soumis au régime fiscal des salariés) d’une filiale pourront se voir attribuer des BSPCE portant sur le capital de la société mère. La filiale doit être détenue à hauteur de 75 % par la société mère ;
Le régime des attributions d’actions gratuites (AGA) va connaître un allègement très significatif de son coût social et fiscal pour les salariés et pour les entreprises qui ont recours à ce mécanisme de fidélisation de leurs meilleurs éléments. Le délai global minimum d’acquisition et de conservation des AGA passera de quatre à deux ans. La contribution sociale patronale exigée sera ramenée de 30 à 20% de la valeur des actions. Elle sera exigible à la date d’acquisition définitive des titres par le salarié et non lors de la décision d’attribution des actions (cette attribution n’était d’ailleurs pas restituable dans le cas où les AGA n’étaient pas définitivement attribuées). Notons également que les bénéficiaires se verront appliquer le régime des plus-values mobilières et ne seront pas imposés comme des salaires sur les gains réalisés. Cela implique donc la possibilité de bénéficier de l’abattement pour une durée de détention applicable aux plus-values de cession d’actions compris sur la plus-value d’acquisition (égale à la valeur des actions au jour où elles sont définitivement acquises, soit au minimum à compter de l’attribution).
La contribution salariale spécifique de 10% est, quant à elle, supprimée, mais les prélèvements sociaux seront portés de 8 à 15,5% (dont 5,1% déductibles). Toutefois, l’imposition globale effective maximum diminuera sensiblement. L’esprit de la loi Macron vise, en effet, à encourager les entreprises à utiliser ce type de dispositif pour attirer les talents sans forcément avoir les moyens de les rémunérer en salaires. La loi Macron abaisse la pression fiscale marginale de 64,5 à 42% (si revente des titres à partir de N+3).
Assurance-vie : l’investissement en capital risque encouragé
A l’occasion d’un rachat ou du dénouement d’un contrat d’assurance-vie, le souscripteur ou le bénéficiaire du contrat pourront opter pour la remise de titres ou de parts, cotés ou non. A la condition toutefois que ces titres/parts ne confèrent pas de droits de vote à leur souscripteur et que ce dernier (ou son entourage familial proche) n’ait pas détenu, au cours des cinq années précédant le paiement, des titres ou des parts de la même entité que ceux remis par l’assureur.
Cela permettra aux contrats souscrits auprès de compagnies d’assurance françaises d’être plus souples et donc mieux à même d’affronter la concurrence, notamment luxembourgeoise. Outre l’apport concurrentiel, cet élément de souplesse était devenu nécessaire avec l’adoption des contrats vie-génération qui peuvent être investis de manière importante en placements non cotés, notamment des fonds ou Fcpr/Fcpi. C’est en effet une manière d’éviter les problèmes liés à la non liquidité de certains actifs lors du dénouement partiel ou total du contrat.
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