29-06-2015
En 1988, un époux souscrit seul un contrat d'assurance-vie. Son épouse adhère conjointement à ce contrat en 1995. L'époux décède en 1999. En 2002, l'épouse verse sur le contrat d'assurance-vie 600 000 euros et désigne comme bénéficiaires à parts égales ses sept petits-neveux et nièces. Elle décède en 2003. L'administration fiscale réclame alors aux petits-neveux et nièces le paiement de droits de succession comme si le contrat avait été ouvert en 1995.
Non, répond la Cour de cassation, pour qui la souscription conjointe de l'épouse en 1995 n'a pas entraîné la disparition du contrat d'assurance-vie ouvert par l'époux en 1988 au profit d'un nouveau contrat. Résultat, le contrat d'assurance-vie conserve son antériorité fiscale.
Il est possible, dans certains cas donc, d'adhérer au contrat d'assurance-vie déjà ouvert par son conjoint, sans que pour autant il s'agisse d'un nouveau contrat, juge ic la Cour de cassation dans l 'arrêt nº323 du 19 mars 2015 pourvoi 13-28.773.
Selon la Cour de Cassation , « la cour d’appel a estimé qu’au rapport d’obligation contracté entre l’assureur et [l’époux] en 1988 ne s’était pas substitué un nouveau rapport d’obligation, mais s’était ajouté, en 1995, du fait de la souscription conjointe de l’épouse, un rapport d’obligation complémentaire entre l’assureur et l’épouse, sans que l’existence du second n’ait un quelconque effet extinctif sur le premier. Elle en a exactement déduit que la souscription conjointe de l’épouse n’avait pas emporté novation du contrat »
Cette co-adhésion est réservée, selon les banques, aux époux mariés sous le régime de la communauté universelle. Elle permet, au décès du premier souscripteur, que le contrat se poursuive au nom et au bénéfice du second, avant de profiter aux héritiers.
La Cour de cassation en a jugé autrement et s'oppose à l'avis du fisc. L'administration fiscale soutenait en effet que l'apparition d'un second souscripteur sur un contrat d'assurance-vie devait être considérée comme une clôture du contrat suivie d'une réouverture d'un nouveau contrat. Ce raisonnement aboutissait à faire disparaître les avantages fiscaux acquis au fil du temps, liés à l'ancienneté, pour repartir de zéro avec un nouveau contrat.
Ce raisonnement permettait aussi de considérer que le contrat était soumis à la réglementation fiscale récente et non à la réglementation ancienne de la date de sa souscription, probablement plus avantageuse. Pour cette raison, au décès du second souscripteur, le fisc avait réclamé des droits de succession en soutenant que le nouveau contrat n'était pas suffisamment ancien pour être exonéré de droits. Les juges au contraire ont considéré que le contrat conservait son antériorité.
Les contrats d’assurance en cas de décès souscrits avant le 20 novembre 1991 sont en principe exonérés des droits de mutation prévus à l ’article 757 B du code général des impôts . Par exception, lorsqu’un contrat subit une importante modification, le bénéficiaire ne peut se prévaloir de cette exonération, notamment lorsque l’opération peut être qualifiée de novation (nouveau contrat). Cet important arrêt de la Cour de cassation, en rejetant le pourvoi du fisc, pose la règle selon laquelle l’adhésion d’un tiers à une police décès préexistante n’est pas une novation, justifiant ici la mise en œuvre du régime fiscal postérieur au 20 novembre 1991. La Haute cour laisse cependant les juges du fond apprécier souverainement la situation.
Bon nombre de contribuables feront leur miel de cette solution. Il est notamment possible d'imaginer qu'un enfant, un petit-enfant, voire un arrière-petit-enfant adhère conjointement à un contrat d'assurance-vie souscrit avant le 20 novembre 1991 par l'un de ses ascendants, et ce afin de conserver l'avantage fiscal de ce type de contrat. Reste à voir comment réagira l'administration fiscale à cette décision.
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