04-08-2014
La prescription de l'action en nullité d'un acte à titre gratuit pour insanité d'esprit engagée par les héritiers ne peut commencer à courir avant le décès du disposant.
Des époux sont désignés bénéficiaires de deux contrats d'assurance-vie. Le souscripteur de ces contrats leur fait également donation, le 28 juillet 1994, de la nue-propriété de sa maison. Il a ensuite été placé sous tutelle le 15 mai 2000, avant de décéder en 2005. Ce n’est que quatre ans plus tard, le 20 janvier 2009, que les héritiers de la défunte ont agi en nullité des actes consentis.
La Cour d’Appel a estimé que l’action des héritiers, engagée en 2009, était prescrite dès lors qu’elle ne pouvait être initiée que dans les cinq ans de la donation, sauf en cas d’impossibilité d’agir, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. L'action des héritiers serait prescrite en 1999.
Placé sous tutelle le 15 mai 2000, il décéde le 17 mars 2005. Ses héritiers assignent alors les donataires le 20 janvier 2009, aux fins d’annulation de ces actes pour insanité d’esprit.
Pour la Cour d’appel de Riom, le point de départ du délai de prescription quinquennale doit être fixé « à la date de l'acte de donation, sauf à reporter ce délai en raison d'une impossibilité d'agir». Et les juges du fond de relever que les héritiers ne rapportent pas la preuve que le donateur a été dans l'impossibilité d'agir en nullité avant son placement sous tutelle. L’action en nullité pour insanité d’esprit serait donc prescrite.
Censure de la Cour de cassation au visa des articles 901 et 1304 du Code civil, la prescription de cette action ne pouvant commencer à courir avant le décès du donateur ,en affirmant, dans un attendu de principe, que « la prescription de l'action en nullité d'un acte à titre gratuit pour insanité d'esprit engagée par les héritiers ne peut commencer à courir avant le décès du disposant ».
La Haute Juridiction a donc estimé que, contrairement au droit commun de la prescription extinctive, la prescription de l’action en nullité offerte aux héritiers d’un disposant commence à courir à compter du décès de celui-ci, et non pas à compter de l’acte contesté.
L’article 1304 du code civil, visé par la Cour de cassation, prévoit dans son aliéna 3, que le délai de prescription d’une action en nullité ne court « contre les héritiers de la personne en tutelle ou en curatelle que du jour du décès, s’il n’a commencé à courir avant ».
Le placement sous tutelle de la défunte est intervenu plus de cinq ans près la donation contestée, et, d’autre part, la Cour de cassation ne fait aucunement référence au placement du disposant sous régime de protection pour fixer le point de départ du délai de prescription au jour de son décès.
L’application du principe posé par la Cour de cassation ne semble donc pas se limiter aux cas de placement du disposant sous un régime de protection.
L’attendu de principe posé par la Cour de cassation est général, ce qui signifie que le report du point de départ du délai de prescription devrait valoir pour l’ensemble des actions en nullité engagées par des héritiers, ce qui serait alors contraire aux dispositions légales en matière de prescription extinctive.
Cet arrêt n’est pas isolé dès lors que la Cour de cassation s’était déjà prononcée en ce sens en matière testamentaire notamment.
(Cassation Civile 1ère, 20 mars 2013, n°11-28318)
Plus d'infos:
Cass. 1ère civ. 29 janvier 2014, N°12-35.341.
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