04-03-2013
L’Assemblée nationale a adopté, le 12 février, le projet de loi
autorisant le mariage pour les personnes du même sexe. Ce texte,
actuellement étudié par la commission des Lois du Sénat, sera examiné,
en séance, à partir du 2 avril prochain.
Selon une récente étude de l’Insee consacrée au « couple dans tous ces
états », sur près de 32 millions de Français qui déclarent être en
couple (en 2011), 200 000 le sont avec une personne de même sexe ( soit
100 000 couples homosexuels).
Des hommes, dans 60% des cas.
Les couples
homos sont plus jeunes que les hétéros : la moitié est âgée de moins de
40 ans, (contre 48 pour les hétéros) et près d’un partenaire sur quatre a
moins de 30 ans. Ils sont aussi plus diplômés : 48% ont un diplôme
universitaire, soit 20 points de plus que les couples homme-femme. Et
plus urbains, les trois quarts vivent dans des grandes villes, où
l’anonymat est plus aisé, précise l’Insee (30% en Ile-de-France).
Enfin,
un couple de sexe identique sur dix réside, au moins une partie du
temps, avec un enfant, généralement né avant l’union actuelle,
majoritairement des femmes.
Le texte voté sera sans doute, à l’issue de la
« navette parlementaire », porté devant le Conseil Constitutionnel pour
validation avant sa promulgation définitive, sans doute lors du 2ième
trimestre 2013, par le Président de la République.
Si ce texte a
nourri un débat houleux et de nombreuses manifestations dans la société française qui d'ailleurs continuent dans la rue pendant les discussions parlementaires, il ne contient pas
en lui-même une « révolution » juridique.
La
légalisation du mariage entre personnes de même sexe induit la
nécessité de nombreuses mises à jour d’autres dispositions légales contenues dans
le Code rural, le Code de l’action sociale et des familles, le Code de
la sécurité Sociale et le Code du travail.
L’article 143 du code civil est désormais ainsi rédigé : « le mariage
est contracté par deux personnes de sexe différent ou de même sexe ».
Rappelons à ce propos que l’article ancien ne se prononçait pas
formellement sur l’interdiction du mariage entre personnes du même sexe,
mais que la Cour de Cassation, saisie à plusieurs reprises, l’avait
restrictivement interprété en interdisant cette union. De cette nouvelle
possibilité découlera pour les couples homosexuels mariés les mêmes
droits et devoirs civils que les autres couples : régime primaire,
régime matrimonial, et règles successorales incluses.( voir ci après )
Point épineux des débats, l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe implique nécessairement l’ouverture de l’adoption, qu’il s’agisse de l’adoption conjointe d’un enfant par les deux époux ou de l’adoption de l’enfant du conjoint.
De la définition actuelle du mariage (article 143 du Code civil), il
ressort deux grandes conséquences: l’une patrimoniale, par la création
de droits (corollaires des devoirs entre époux), l’autre filiale, se
traduisant pour l’enfant en le droit de savoir de qui il est né, par
l’inscription du nom des parents biologiques dans l’acte de naissance.
Ce que prévoit le projet de loi. L’exposé des motifs de la loi offre une
égalité des droits entre couples homme-femme et de sexe identique.
Le projet se compose ensuite de 16 articles
sur 23 qui consistent à supprimer les termes « père » et « mère » de 157
articles du Code civil et d’autres codes (sécurité sociale, impôts,
assurance vieillesse, etc..), pour les remplacer par le terme « parent
».
Un intérêt patrimonial relatif en faveur des personnes homosexuelles
qui feront le choix de se marier. La réécriture du droit des successions
et des libéralités concerne une quinzaine d’articles (C. civ art 368-1,
733, 734, 737, 738-1, 740, 743, 745-749, 756, 757-1, 904, 975, 995 et
1802 ). Les droits du conjoint successible s’appliqueront à tous les
conjoints survivants y compris ceux du même sexe.
Cependant, ces
avantages patrimoniaux doivent être nuancés.
D’une part, la loi TEPA du
21 août 2007 (en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat)
permet déjà au partenaire lié par un PACS (Pacte civil de solidarité),
en vertu d’un testament, d’être exonéré de droits de succession (article
796-0 6 CGI). De même, le partenaire survivant bénéficie de plein droit
de la jouissance gratuite du logement principal, ainsi que du mobilier
qui le garnit (763 du code civil), et de l’attribution préférentielle,
sous réserve que le défunt l’ait expressément prévu (art. 831-3 du Code
civil).
D’autre part, le mariage ne sera pas toujours opportun, en
particulier, au regard de la faculté de disposer du logement principal,
qui nécessitera un accord commun. Une absence de conséquence au regard
de la filiation (du moins en l’état actuel du projet de loi). La
filiation volontaire ne peut se traduire in fine, ni pour un couple de
femmes car l’utilisation de la PMA (Procréation médicalement assistée)
est interdite par le Code de la santé publique (art L.2141-2), qui en
réserve son accès à « l’infertilité pathologique » entre « un homme et
une femme constituant le couple », ni pour un couple d’hommes, car la
pratique de la GPA (Gestation pour autrui) est également interdite.
L’accès au statut marital ne modifiera donc pas en profondeur la
situation des partenaires de même sexe entre eux à l’égard des enfants
élevés. Le lien pouvant exister entre un enfant et le partenaire de même
sexe que son père ou sa mère reste soumis au droit actuel. A titre
d’exemple, le partage de l’autorité parentale est possible par décision
de justice (C.civ art 377-1).
Les
Français auront la possibilité de se marier avec un étranger de même
sexe, ou deux ressortissants étrangers la possibilité de se marier en
France, même dans le cas où la loi du pays d’origine du ou des futurs
époux ne reconnaîtrait pas la validité du mariage homosexuel. Le mariage
entre personnes de même sexe contracté régulièrement à l’étranger,
avant l’entrée en vigueur de la loi, pourra faire l’objet d’une
transcription en France.
Le projet de loi permettant aux couples de même sexe de se marier ne
modifie pas le droit existant. Conséquence, il leur étend certains
droits patrimoniaux jusqu'à présent réservés de facto aux couples
hétérosexuels, puisque le pacs ou le concubinage ne les offrent pas.
Fin du régime de la séparation de biens obligatoire pour les couples homosexuels
Changement majeur, s'ils ne font pas de contrat de mariage, les couples de même sexe
(comme tous les autres couples) seront automatiquement placés sous le
régime de la communauté légale réduites aux acquêts : tous les biens
acquis – ensemble ou séparément durant le mariage – seront des biens
communs.
C'est un changement important par rapport au pacs où les
couples sont soumis par défaut à un régime de séparation de biens :
c'est-à-dire que même après la conclusion du pacs, chacun reste
personnellement propriétaire des biens qu'il achète, qu'il crée (comme
un fonds de commerce) ou qu'il reçoit par donation ou par succession.
En
revanche, chacun des époux restera personnellement propriétaire des
biens dont il était déjà propriétaire avant le mariage ainsi que de ceux
qu'il recevra durant le mariage par héritage ou par donation.
L’ouverture du mariage aux couples de
personnes de même sexe implique nécessairement l’ouverture de
l’adoption, qu’il s’agisse de l’adoption conjointe d’un enfant par les
deux époux ou de l’adoption de l’enfant du conjoint.
Modification, pour tous les couples mariés des règles de dévolution du
nom de famille. En cas de désaccord ou d’absence de choix des parents,
les noms de chacun d’eux, accolés dans l’ordre alphabétique, seront
donnés à l’enfant, alors qu’actuellement c’est le nom du père qui est
attribué.
Solidarité entre époux
Autre effet de ce texte, la loi prévoit lorsque le couple est marié que toutes les
décisions relatives à la résidence principale du couple doivent être
prises d'un commun accord par les deux époux. Conséquence : un des époux
ne pourra pas vendre seul le logement du couple, sans l'accord de
l'autre, même si ce logement lui appartient personnellement, ce qui est
le cas dans le cadre du pacs. De même, un des époux ne pourra pas donner
congé au propriétaire sans l'accord de l'autre, même si le contrat de
location a été signé avant le mariage par un seul d'entre eux.
Les
époux seront solidaires pour le paiement des loyers et des charges et
le resteront même en cas de séparation ; le propriétaire sera alors en
droit de réclamer le paiement du loyer à l'un ou à l'autre. En cas de
décès, le conjoint survivant aura le droit de rester gratuitement dans
le logement du couple pendant un an (idem pour un couple pacsé, mais ce
n'est pas le cas pour un concubin). Passé ce délai, il pourra demander à
bénéficier jusqu'à la fin de sa vie d'un droit d'habitation sur son
logement, même s'il se remarie.
Le droit à réversion pour la retraite
Dans tous les régimes de retraite (base et
complémentaire), le mariage est une condition sine qua none pour
prétendre au versement d'une pension de réversion, à savoir le versement
d'une partie de la retraite dont bénéficiait l'assuré à sa mort.
L'ouverture du mariage aux couples homosexuels a donc pour principale
conséquence de leur ouvrir un droit à réversion dans les mêmes
conditions que les couples hétérosexuels.
La conjoint survivant héritier réservataire
Le conjoint survivant a toujours
vocation à recevoir une partie de la succession de son époux décédé, ce
qui n'est pas le cas dans le cadre du pacs où les couples n'héritent pas
automatiquement l'un de l'autre.
La part de la succession dépend des autres héritiers vivants :
—
si le couple avait des enfants communs, le survivant héritera au choix
de la totalité de la succession en usufruit ou du quart en pleine
propriété ;
— si le défunt avait des enfants d'une précédente union, le survivant héritera du quart en pleine propriété ;
—
si le défunt n'avait pas d'enfant, le survivant héritera de la moitié
de la succession si les deux parents de son conjoint décédé sont encore
en vie, des trois quarts si un seul des parents de son conjoint est
encore en vie et de la totalité si les deux parents sont décédés. Dans
cette hypothèse, il deviendra même héritier réservataire à hauteur du
quart de la succession.
Donation entre époux au dernier vivant
Autre intérêt du mariage, en matière de protection du survivant : en
présence d'enfants, les couples mariés pourront transmettre à leur
"moitié" par donation au dernier vivant ou par testament une part plus
importante de leur succession que les couples non mariés, via la
"quotité disponible spéciale entre époux", qui comme son nom l'indique
n'existe qu'entre époux.
Divorce entre couples homosexuels
Qui dit mariage... dit divorce potentiel. En cas de séparation, le conjoint peut recevoir une prestation compensatoire qui n'existe pas dans le cadre du pacs.
Plus d'infos:
Société : ouverture du mariage aux couples de même sexe Source Assembléé Nationale
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